Au lendemain de la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par le Président de la République, le Sénat a suspendu tous ses travaux législatifs dans l’hémicycle. Pour autant, les travaux de contrôle ne se sont pas arrêtés.
Commission des affaires européennes : Conseil européen des 27 et 28 juin
Après le renouvellement du Parlement européen, les chefs d’Etat des 27 Etats membres se sont réunis. Ils se sont mis d’accord sur les désignations et nominations aux plus hautes fonctions de l’UE et ont adopté le programme stratégique pour 2024-2029.
La candidate proposée à la fonction de présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, devra ensuite être élue par le Parlement européen à la majorité de ses membres. La nomination formelle de la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, l’estonienne Kajas Kallas, requiert l’accord de la présidente élue de la Commission européenne. La présidente de la Commission, la haute représentante , et les autres membres de la Commission seront soumis, en tant que collège, à un vote d’approbation du Parlement européen, avant que le Conseil européen ne procède à leur nomination formelle. António Costa a été élu en tant que président du Conseil européen.
Face à une nouvelle réalité géopolitique, le programme stratégique 2024-2029 repose sur trois piliers : une Europe libre et démocratique ; une Europe forte et sûre ; une Europe prospère et compétitive.
Les membres du Conseil ont également adopté des conclusions sur l’Ukraine, le Moyen-Orient, la sécurité et défense, la compétitivité, les migrations, la mer Noire, la Moldavie, la Géorgie, les menaces hybrides, la lutte contre l’antisémitisme, le racisme et la xénophobie, ainsi qu’une feuille de route sur les réformes internes.
Lors de l’audition du ministre des affaires européennes, Jean-Noël Barrot, préalable au Conseil européen, je me suis exprimée au nom de la commission des finances. J’ai notamment demandé dans quelle mesure la voix de la France peut continuer à porter alors que notre pays a été mis sous surveillance du fait de la situation de ses finances publiques.
La commission des finances valide la publication de six rapports de contrôle budgétaire
La commission des finances du Sénat s’est réunie les 9 et 10 juillet et a validé la publication de six rapports de contrôles budgétaires : l’immobilier de la gendarmerie ; les facteurs explicatifs des perspectives d’évolution différentes en matière de charge de la dette entre la France et les principaux États européens ; l’aide alimentaire ; l’efficacité de la commande publique dans l’enseignement supérieur ; le suivi des recommandations du rapport « Jouons collectif pour l’avenir du Stade de France » ; les démineurs de la sécurité civile. Vous pouvez retrouver les six rapports : https://www.senat.fr/travaux-parlementaires/commissions/commission-des-finances/actualites-de-la-commission-des-finances.html
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Le contrôle budgétaire d’Eric Jeansannetas fait suite à ses travaux de 2019 portant sur l’avenir du Stade de France à l’heure du renouvellement du contrat de concession et les actualise. La concession de 1995 avec le consortium du Stade de France s’est avérée très coûteuse pour les finances publiques, notamment en raison de l’absence de club résident, mais également en raison de nombreuses fragilités juridiques sources de contentieux.
Aujourd’hui, à l’heure où la France s’apprête à accueillir les jeux olympiques, le Stade de France est une pièce maitresse du dispositif Paris 2024. Après une campagne de travaux de modernisation terminés dans les délais et dans le respect de l’enveloppe budgétaire, l’enceinte est prête à accueillir 43 des 48 épreuves d’athlétisme, la compétition de rugby à 7 ainsi que la cérémonie de clôture. La prise en charge des pertes d’exploitation est organisée par un protocole entre l’État et le Consortium, signée en décembre 2023, et le financement des autres coûts relatifs à la mise à disposition est réglée par une convention signée au même moment entre le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (COJOP) et le Consortium. Les dispositions de ces conventions semblent équilibrées. Le loyer et les frais techniques, d’un montant évalué à 14,5 millions d’euros, sont, selon le COJOP, dans la moyenne de leurs autres contrats.
Il convient désormais d’assurer le renouvellement de la concession afin de garantir l’avenir du Stade de France. Des négociations sont en cours, notamment avec les Fédérations françaises de football (FFF) et de rugby (FFR), partenaires indispensables du Stade de France. « C’est uniquement en développant un modèle d’exploitation qui permette le développement économique de l’enceinte tout en préservant les finances publiques que le Stade de France pourra demeurer un symbole des ambitions sportives de notre pays. » a tenu à souligner Eric Jeansannetas.
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La charge des intérêts de la dette de l’État représente en 2024, avec plus de 50 milliards d’euros, le deuxième poste budgétaire après l’enseignement scolaire (hors CAS Pensions et remboursements et dégrèvements). Alors que ce montant est appelé à croître fortement sous l’effet de la remontée des taux d’intérêt, à mesure du refinancement progressif des titres de dette, la France connaîtrait l’évolution la plus importante en points de PIB parmi les États européens, de plus de 1 % à l’horizon 2030. Cette situation particulièrement dégradée s’explique, sans surprise, par le poids d’un stock de dette en croissance continue, marqué par l’accumulation des déficits, et qui, sans réorientation de la politique budgétaire, ne devrait pas diminuer dans les années à venir. À ces éléments s’ajoute le contexte institutionnel incertain ouvert par la dissolution de l’Assemblée nationale, qui s’est traduit par une augmentation sensible de la prime de crédit exigée par les investisseurs, mesurée par l’écart de taux avec la dette allemande, de plus de 10 points de base. Alors que les charges de la France et de l’Allemagne étaient identiques en proportion du PIB jusqu’au début des années 2010, la charge d’intérêt de la dette française est devenue le double de celle de la dette allemande, avec 1,7 % du PIB pour la France contre 0,8 % du PIB pour l’Allemagne en 2023.
D’après les dernières projections communiquées en avril 2024 par le Gouvernement dans le cadre du programme de stabilité 2024-2027, le poids de la charge de la dette de l’État devrait continuer à s’accroître fortement dans les prochaines années, pour quasiment doubler entre 2023 et 2027. Ainsi, la charge des intérêts de la dette de l’État est attendue à 46,3 milliards d’euros pour 2024 et devrait s’élever à 72,3 milliards d’euros en 2027, contre 39,0 milliards d’euros en 2023. Selon le Fonds monétaire international (FMI), la France ne connaîtrait pas de désendettement dans les années à venir, par contraste avec l’immense majorité des États européens. L’alourdissement de la charge de la dette française serait supérieur à celui anticipé pour l’Espagne, la Grèce et l’Italie à l’horizon 2029. L’augmentation continue du stock de la dette, sous l’effet de l’accumulation des déficits, notamment dans la période récente, explique les perspectives dégradées quant à la croissance de la charge de la dette dans les prochaines années. À noter que ces projections à politique budgétaire inchangée, réalisées avant la dissolution, n’intègrent pas l’hypothèse d’une déviation de la trajectoire des finances publiques qui pourrait résulter de l’arrivée au pouvoir d’un nouveau gouvernement.
Le retour de l’encadrement budgétaire européen, via la réforme du Pacte de stabilité et de croissance entrée en vigueur le 30 avril 2024, devrait remettre au cœur des discussions la maîtrise de l’endettement public, dans un contexte de besoins d’investissement massifs en matière d’industrie, de défense et d’environnement. La Commission européenne a initié une procédure pour déficit excessif à l’encontre de la France et de six autres États membres le 19 juin dernier. Une stratégie de stabilisation de la dette doit urgemment être mise en œuvre. À défaut, le risque existe, à plus ou moins brève échéance, de se voir imposer des mesures encore plus drastiques par les autorités européennes, en cas de crise de confiance sur les marchés. D’après le programme de stabilité, l’effort de consolidation pour 2025 serait ainsi de 20 milliards d’euros.
Enfin, dans une période particulièrement instable, une connaissance plus fine de la structure de détention de la dette doit viser à préserver la dette française d’une exposition, voire d’une dépendance, à l’égard d’un type de porteurs déterminé. En effet, la diversification des détenteurs de la dette constitue un atout majeur pour la France, avec aujourd’hui un quart de la dette détenu par la BCE, un cinquième par les investisseurs français, un cinquième par les investisseurs de la zone euro et un tiers par les investisseurs hors zone euro, européens ou du reste du monde.